Lors du 65e anniversaire de Louis, la grande famille était réunie pour célébrer dans un restaurant animé. Tout allait bien jusqu’à ce que Louis, dans un moment d’inspiration inattendue, lance à sa fille Stéphanie : « Aimerais-tu prendre la relève de l’entreprise ? » La question, posée devant tout le monde – y compris David, le frère de Stéphanie, qui travaille aussi dans l’entreprise familiale – a créé un malaise palpable. Sous le choc, le frère et la sœur se regardaient, envahis par des émotions confuses qu’ils avaient du mal à décrypter. De retour à la maison, ils ont consulté leur roue des émotions et des besoins pour prendre du recul et comprendre ce qui se passait à l’intérieur d’eux, pour ensuite en discuter dans un conseil de famille.
La roue des émotions : mettre des mots sur ses ressentis
Les émotions sont omniprésentes, particulièrement dans les familles en affaires. Elles sont souvent causées par des non-dits, parce qu’on veut protéger les autres en évitant de provoquer une chicane et de leur faire de la peine. Les émotions peuvent aussi être mal interprétées, et ce, même si on croit tout savoir de son frère, de sa tante ou de son grand-père.
Ouf! Pas toujours facile de verbaliser ses émotions, surtout avec les membres de la famille. Alors qu’est-ce qu’on fait dans ce temps-là? On les garde pour soi, alors que c’est tout à fait l’inverse qu’on devrait faire. Et quand on prend son courage à deux mains et qu’on parle, les mots sortent tout croches et on regrette vite d’avoir parlé.
C’est ici qu’intervient la roue des émotions, un outil concret, facile à comprendre avec la tête et qu’on utilise avec son cœur. Son fonctionnement est simple et intuitif. Lorsqu’une émotion vous envahit, il suffit de localiser l’émotion de base qui vous habite, puis de la préciser à l’aide de sous-catégories.
Voyons maintenant ce qu’auraient découvert Louis, Stéphanie et Louis avec la roue des émotions.
Louis se sentait heureux d’annoncer la nouvelle à toute la famille, optimiste quant à l’avenir de son entreprise, serein par rapport à sa décision, comblé d’être entouré des siens…
Stéphanie était joyeuse de célébrer l’anniversaire de son père et emballée qu’il la considère comme sa relève. Toutefois, elle ressentait aussi de la tristesse, de la culpabilité, de la surprise et de l’irritation vers Louis, qui avait lâché cette bombe sans prévenir. Elle craint également la réaction de son frère.
David est en colère, fâché, irrité, assommé, exaspéré, anxieux et déçu… Inutile de vous expliquer pourquoi, n’est-ce pas?
La roue des besoins : aller à la source des émotions
C’est immanquable : derrière chaque émotion difficile se cache un besoin non satisfait. Une fois que l’on identifie ce besoin – poser ses limites, se sentir écouté – on peut agir de manière constructive. La roue des besoins permet d’aller au-delà de l’émotion pour en comprendre la racine. Bien sûr, les émotions positives nous parlent également : elles nous renseignent sur nos besoins comblés. Un excellent indicateur!
Quand on est dans nos émotions, notre cerveau est moins accessible. Mettre des mots dessus nous redonne notre pouvoir et nous aide à être compris tout en dépersonnalisant le débat. »
Pendant leur conseil de famille, qui heureusement avait lieu quelques jours plus tard, Stéphanie a lancé la discussion en mentionnant que ses besoins de sens (comprendre la décision de son père), d’harmonie et de collaboration n’étaient pas comblés. De son côté, David a confié que ses besoins de clarté, d’estime de soi et de fierté n’étaient pas satisfaits. Enfin, Louis a expliqué que s’il était aussi serein et optimiste, c’est parce que son besoin de sécurité était comblé. Il savait que si sa fille prenait la relève, sa sécurité financière serait assurée.
C’est seulement après avoir discuté de leurs besoins qu’ils ont pu s’expliquer et trouver des solutions à la situation épineuse.
Les bénéfices de la roue des émotions et des besoins
C’est simple : chaque fois qu’on n’arrive plus à se comprendre. Les roues contribuent à réaliser une introspection et à clarifier les choses. Voici ce qu’elles permettent :
- Comprendre ses besoins et ceux des autres, puis en discuter : un atout essentiel pour éviter les malentendus et s’adapter aux autres membres de l’équipe.
- Différencier une émotion d’un faux sentiment.
- Reprendre son pouvoir, alors qu’on croit que ce n’est que la faute de l’autre. On parle bien sûr de situations sans criminalité ni abus.
- Créer un plan d’action : identifier les besoins permet de réfléchir aux solutions concrètes.
- Désamorcer les conflits : quand on exprime ses besoins avec précision, les discussions deviennent plus constructives et on peut trouver des pistes de solutions.
- Briser les tabous : mettre des mots sur des sujets délicats devient plus accessible et libérateur.
Les émotions peuvent compliquer les discussions. Utiliser la roue apporte un apaisement immédiat et peut transformer des échanges houleux en discussions empreintes de compréhension et d’empathie.
La roue des émotions et des besoins n’est pas réservée aux familles en affaires. Elle fonctionne pour tout le monde, y compris les adolescents ou les personnes ayant plus de difficulté à verbaliser leurs émotions. Et bien qu’il puisse être difficile de trouver les bons mots au début, la pratique finit toujours par porter ses fruits.
Alors, ne vous privez pas de cet outil aussi simple que puissant. Tout comme apprendre à faire du vélo, mettre des mots sur ses émotions et besoins demande de la persévérance. Mais les résultats valent l’effort : mieux se comprendre pour mieux vivre ensemble.
Pour aller plus loin sur le sujet :

Jade Bélanger
Accompagnatrice, médiatrice et repreneure
Derrière chaque succès, échec, plan stratégique, bilan financier… il y a avant tout des humains. Et vous savez tout comme moi que des humains, ça n’arrive pas avec un manuel d’instruction. Heureusement que les tests psychométriques nous facilitent la communication ainsi que le travail d’équipe ! J’adore travailler avec le test AtmanCo, un merveilleux outil qui facilite la connaissance de soi et la gestion d’équipe. Il permet de détecter les forces, les talents ainsi que les points de vigilance de chacun et de l’ensemble de l’équipe. Je ne m’en passerais plus… et nos clients aussi !
Doté d’un regard allumé et d’un esprit vif, je m’occupe également de la gestion administrative de l’entreprise et de la création d’outils pour soutenir les différentes interventions. Des guides, questionnaires, des schémas, des check lists … en voulez-vous des outils, et voilà.
Ciblée repreneure de l’entreprise familiale, je suis animée par la question du transfert au cœur des entreprises familiales. Et je vais vous raconter un secret : ma mère et moi, ça nous arrive aussi d’avoir du mal à nous comprendre. Mais comme on connaît la « recette magique », se parler et s’écouter, aucun nœud n’est impossible à dénouer.

Sylvie Huard
Accompagnatrice, médiatrice et fondatrice
Moi-même entrepreneure, repreneure et cédante à plusieurs reprises, le terrain en matière de transfert d’entreprise, je m’y connais! Eh oui, j’ai réalisé 10 transactions d’actions, dont 3 en entreprises familiales. J’ai aussi eu le grand privilège d’occuper le poste de PDG au sein d’une entreprise qui a vu ses ventes passer de 13 à 100 millions de dollars en 11 ans.
Malgré un parcours enrichissant dans le monde des affaires, un MBA et un baccalauréat en psychologie, je suis en perpétuelle formation, cherchant sans cesse à raffiner mon art.
Accompagner une famille en affaires, c’est plonger au cœur non seulement de son entreprise, mais aussi de son intimité. Et c’est pour créer ce sentiment de confiance essentiel pour se dévoiler et se dire les vraies affaires, même quand c’est difficile, que je mets tout en œuvre pour créer des espaces intergénérationnels sécurisants.
Chacun a sa propre façon de redonner au suivant. Pour ma part, je me dédie au bien-être des individus et des familles par la recherche et l’écriture. Dans Entreprise familiale : jaser d’affaires en famille sans cocotte de vaisselle , j’ai voulu outiller les familles à préserver l’harmonie familiale et la pérennité de leur entreprise.