Qu’est-ce qui empêche les équipes de demander de l’aide?

Qu’est-ce qui empêche les équipes de demander de l’aide?

Notre voiture fait un son étrange: on va donc chez notre garagiste. Une dent nous fait souffrir: on prend rendez-vous chez notre dentiste. On veut un rapport d’impôt bien rempli: on le confie à notre comptable. Et la liste des experts que l’on consulte pourrait s’allonger encore longtemps. Alors, pouvez-vous me dire ce qui empêche les équipes de demander de l’aide pour retrouver ou préserver l’harmonie au travail?

Quels sont ces freins et les avantages à les dépasser? Existent-ils des solutions?

Cinq principaux freins à se faire aider

Plusieurs raisons expliquent pourquoi si peu d’équipes se font accompagner.

 

1)      « Je ne savais pas que ça existait.»

Cette phrase, je l’entends si souvent lorsque je commence une intervention auprès d’une équipe. Contrairement à ce que plusieurs pensent, une entreprise, ce n’est pas «seulement» un endroit où l’on travaille. C’est aussi un endroit pour s’épanouir et créer des liens. Pour y arriver, c’est important d’améliorer la connaissance de soi et des autres, et surtout d’avoir accès à un endroit sécuritaire pour faire fleurir tout ça.

Si vous faites partie d’une famille en affaires, vous entendrez peut-être la phrase qui suit…

 

2)      «Mon père/ma mère/mon oncle… ne voudra rien savoir.»

Dans la majorité des familles, il y a souvent un médiateur naturel: une responsabilité informelle qui peut devenir lourde à la longue. Cette personne verra l’arrivée d’un expert en harmonie familiale comme une bouffée d’air frais, puisqu’elle pourra enfin partager cette responsabilité avec quelqu’un d’autre.

 

3)      «On est bien trop petit pour se faire aider.»

Aucune entreprise n’est trop petite pour se faire accompagner (je vous promets que vous n’aurez pas besoin de vendre un rein).

 

4)      «Pas question de laver notre linge sale avec un inconnu.»

La majorité des familles en affaires ne lavent pas leur linge sale en famille. Le problème, c’est que plus le temps passe, plus ça sent mauvais.

 

5)      «Je ne veux pas parler de sujets délicats car j’ai peur que ça fasse éclater l’équipe ou, encore pire, ma famille.»

C’est tout le contraire… et vous allez en avoir la preuve dans les lignes qui suivent.

 

Et si on maintient le statu quo?

Les non-dits occupent une place importante dans les équipes. Et la situation est encore pire dans les familles en affaires. Chaque membre est loyal et bien intentionné envers les autres, alors, pour éviter les conflits potentiels, il va garder pour lui ce qui le dérange. Multiplier le tout par le nombre de collègues ou de membres de la famille : ça donne beaucouuuup de non-dits.

Résultat? On fuit les discussions difficiles, on s’évite de plus en plus et on se comprend de moins en moins.

Les humains souffrent.
L’entreprise souffre aussi.

Une étude réalisée auprès de centaines de fermes dans le nord-ouest américain a permis de tracer la courbe idéale du conflit. Aux extrémités, quand il n’y a pas de conflit ou qu’il y en a beaucoup, l’entreprise se porte plutôt mal.

Par contre, lorsque certains conflits surviennent et qu’ils sont réglés, l’entreprise performe. On comprend donc l’importance de verbaliser ses insatisfactions, d’exprimer ses besoins et de négocier.

 

Manque de courage ou peur de souffrir?

Préparez-vous à tomber de votre chaise…

Il y a plusieurs années, alors que j’assistais au congrès Family Firm Institute, en Angleterre, lors de la conférence de clôture, le conférencier nous a posé la question suivante: «Selon vous, quel est le souhait universel, celui qui est unanime, peu importe où l’on habite dans le monde?»

Les réponses de l’assemblée oscillaient entre le bonheur et la paix dans le monde.

Mais non, nous étions tous dans le champ.

Tout le monde veut éviter la souffrance. Ceci explique cela, n’est-ce pas? Personne ne veut faire de la peine à sa mère, déplaire à son père ou offusquer son collègue. Toutefois, il suffit qu’un leader dise haut et fort que les non-dits, ça suffit, et qu’il est temps que l’équipe ou la famille s’outille pour que tous ses membres s’allient pour avancer dans la même direction.

C’est ici qu’il est important d’assurer un climat sécurisant pour que tout se passe pour le mieux.

 

Prévenir ou guérir?

Lorsqu’un facilitateur entre dans la vie d’une famille en affaires ou d’une équipe, il agit parfois à titre préventif et d’autres fois à titre curatif.

Agir en prévention, c’est l’idéal. La prévention consiste à mettre en place la gouvernance de l’entreprise. Pour la famille en affaires, on parle d’un conseil de famille, d’un comité des actionnaires présents et futurs, et d’un comité exécutif. C’est aussi organiser des rencontres annuelles et éduquer la jeune génération afin qu’elle devienne de bons futurs propriétaires. Pour l’équipe de travail, on parle plutôt d’un conseil de relève ou d’un comité d’ambiance.

Quand on n’agit pas en prévention, alors on doit passer au mode curatif. Un facilitateur pourra aider la famille ou l’équipe à aborder des sujets délicats afin de prévenir l’escalade de la discorde. Et si jamais on a trop attendu et que «ça pète», un médiateur pourra vous aider à désamorcer le conflit.

 

Sur la bonne voie

Ça fait longtemps que des ressources existent pour accompagner les entreprises sur la route de l’harmonie, mais c’était tabou. Il ne fallait surtout pas que ça se sache.

Aujourd’hui, on assiste à un retour du balancier: demander de l’aide pour aller mieux, c’est maintenant bien vu. Et si ce changement de mentalité est en train de se réaliser, c’est grâce à de merveilleux ambassadeurs.

Je pense entre autres à Caroline Thuot, ex-présidente d’EntreChefs PME, qui ne rate pas une occasion de parler des familles en affaires et de l’importance de se faire aider, que ce soit sur les réseaux sociaux ou pendant des conférences. Je pense aussi à l’École d’entrepreneurship de Beauce qui sensibilise les dirigeants d’entreprise à bien s’entourer ainsi que l’Université Laval et l’UQTR qui proposent un cours sur le transfert d’entreprise.

Vous faites partie d’une famille en affaires ou d’une équipe tissée serrée et vous hésitez à vous faire accompagner? Rappelez-vous que le premier pas est toujours le plus difficile. Toutefois, ce premier pas, qui vous demandera certainement beaucoup de courage, est le plus beau gage d’amour que vous pouvez témoigner à vos proches et à vos collègues.

Sylvie Huard

Sylvie Huard

Moi-même entrepreneure, repreneure et cédante à plusieurs reprises, le terrain en matière de transfert d’entreprise, je m’y connais!  Eh oui, j’ai réalisé 10 transactions d’actions, dont 3 en entreprises familiales.  J’ai aussi eu le grand privilège d’occuper le poste de PDG au sein d’une entreprise qui a vu ses ventes passer de 13 à 100 millions de dollars en 11 ans.

Malgré un parcours enrichissant dans le monde des affaires, un MBA et un baccalauréat en psychologie, je suis en perpétuelle formation, cherchant sans cesse à raffiner mon art.

Accompagner une famille en affaires, c’est plonger au cœur non seulement de son entreprise, mais aussi de son intimité.  Et c’est pour créer ce sentiment de confiance essentiel pour se dévoiler et se dire les vraies affaires, même quand c’est difficile, que je mets tout en œuvre pour créer des espaces intergénérationnels sécurisants.

Chacun a sa propre façon de redonner au suivant.  Pour ma part, je me dédie au bien-être des individus et des familles par la recherche et l’écriture.  Dans  Entreprise familiale : jaser d’affaires en famille sans cocotte de vaisselle , j’ai voulu outiller les familles à préserver l’harmonie familiale et la pérennité de leur entreprise.